1) Arrivez de préférence avec le look d'un fils d'avocat - chemise soigneusement rentrée dans le pantalon, chaussure en cuir (cirées, s'il vous plaît ), coiffure classique (surtout pas de dégradé !), et bien sûr la petite sacoche sur laquelle vous vous appuierez pour prendre avidement des notes dès que le moindre membre du jury ouvrira la bouche.
2) Si vous avez un sujet libre, prenez un thème métaphysique ou très littéraire. N'oubliez surtout pas de bien étaler votre science, si vous parlez du théâtre, citez à la pelle des noms de metteurs en scène, ça fait "bien". Surtout, ne choisissez pas un sujet inhabituel - dans ce monde, on aime le respect des traditions. Le but étant, évidemment, de prouver que vous avez appris par cœur une centaine de citations et de dates.
3) Si vous le jugez nécessaire, placez quelques citations de l'Évangile au sein de votre discours, histoire de bien montrer que vous venez d'une bonne famille qui a parfait votre éducation religieuse (et que vous avez appris par cœur les textes fondamentaux, uhu )
4) Quoi qu'il arrive, essayez de décerner divers compliments au jury - vous pouvez, par exemple, indiquer que vous aimez particulièrement les sujets imposés.
5) Mettez de l'humour dans votre prestation : les blagues habituellement peu drôles (auxquelles personne ne rit) font très bon effet ; bien sûr, ponctuez le tout d'un rire élégant et convainquant. Généralement, le jury rira avec vous. Si vous prenez un sujet d'apparence compliquée, vous pouvez lancer "eh oui, il y en a toujours qui sont un peu fous !" après l'introduction. Pas besoin de précisions supplémentaires, le commun des mortels est capable de "blagues pas marrantes".
6) Branchez vous en mode dictionnaire : bannissez de votre langage toute expression non soutenue. Utilisez les termes "il est vrai", "paradoxalement", "néanmoins", "il est notable que" en abondance (c'est le niveau minimum requis ! ) ; de préférence, exprimez vous comme un essayiste et prouvez votre maîtrise absolue de la langue française (même si personne n'aurait l'idée de s'exprimer ainsi, même lors d'un discours).
7) Cependant, les mots ne seraient rien sans la voix. Adoptez un accent des bons milieux : si vous prononcez le mot "théâtre", baissez l'intonation sur le "â" et allongez cette syllabe (théÂÂÂÂtre). Si vous n'avez pas idée de la voix à adopter, écoutez les radios des années 40, les speakers ont une intonation qui se rapproche de celle préconisée ici.
8) N'oubliez pas de gesticuler dans tous les sens (votre corps doit "parler" avec vous !). N'ayez pas peur du ridicule, même si ni politiques ni avocats n'utilisent ce genre de gestuelle, remuer les bras dans tous les sens et marcher par la même occasion "fait pro".
9) Si possible, liez vous d'amitié avec le président du jury, d'une manière ou d'une autre (même si l'impartialité la plus totale est de mise, cela va sans dire)
10) Et enfin, souriez à la moindre parole que vous adresse le jury, et restez sur le mode "dictionnaire" lors de la remise des prix (en effet, si vous avez respecté les conditions ci-dessus et que votre discours est cohérent et construit). Si jamais on vous décerne un modique chèque d'une centaine d'euros, remerciez votre donateur par un "fort aimable" prononcé avec la voix et l'intonation adéquates (cf note 7 ). Il est vrai que répondre un simple "merci" serait une bassesse de votre part.
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